Je m’étais lancé dans un article fleuve sur le CO2, les énergies du futur et leur liens avec l’économie mondiale… Et puis j’ai réalisé que tout ce que j’avais à en dire figure déjà sur un site absolument génial : Manicore.com.
C’est le site de Jean-Marc Jancovici, ingénieur conseil indépendant spécialiste de ces domaines, mais surtout capable de les vulgariser très efficacement grâce à un style décontracté, souvent amusant, ou l’auto-dérision côtoie les informations les plus sérieuses et fiables . Il est un des auteurs de la méthode « Bilan Carbone » de l’ADEME, un de ses nombreux clients, et vient de publier deux livres de plus [4][5].
Manicore.com détaille plusieurs sujets déjà esquissés sur Dr. Goulu comme une FAQ sur l’effet de serre (c’était ici), l’hydroélectricité (ici), le stockage du CO2 (là), le chauffage électrique (j’en ai causé ici), les piles à combustible et l’hydrogène ( là), le pic du pétrole (c’était là), les éoliennes (encore ici) plus évidemment une foule d’autres avec abondance de données chiffrées, de graphiques parlants et de sources citées.
A part cela Jean-Marc Jancovici bouleverse aussi beaucoup les idées reçues, par exemple sur les voitures électriques ou le principe du pollueur-payeur, et les solutions qu’il préconise sont aussi peu populaires que douloureusement inévitables selon lui : réduction de la consommation d’énergie par habitant d’un facteur 2 à 3 induite par une très forte taxe sur les combustibles fossiles, avec maintien voire développement du nucléaire dans l’intervalle.
Personnellement je ne suis pas encore convaincu que l’équation de Kaya (ci dessous) n’admette pas d’autre solutions que les siennes.
En particulier, il me semble que l’efficacité énergétique (produit des deux premiers facteurs, donc le CO2/$ PIB) a encore une large marge de progression. La Suisse est dans ce domaine le premier pays industrialisé, atteignant 0.61 tonnes de CO2 par dollar de PIB, soit un score situé entre le Salvador ou la Papouasie Nouvelle-Guinée, alors que la France est à 0.78, les USA à 1.77 et la Chine à 2.03, ce qui laisse une bonne marge de progression.
De plus, le dernier terme ne doit pas être négligé : pourquoi taxer le CO2 et continuer à favoriser la natalité ? Loin d’envisager des mesures drastiques à la chinoise ou de souhaiter guerres ou épidémies, je m’interroge : pourquoi mes voisins français sont-ils si fiers de détenir le record européen de fécondité ? C’est anti-écologique ! Si on ne réduit pas la population, il y aura tout simplement plus d’humains à se partager les mêmes ressources limitées…
Bref, le site Manicore.com est une mine indispensable d’information et de réflexion sur les problèmes économico-écologiques du monde, à visiter et à bookmarker d’urgence.
On y trouve même une illustration de la théorie de l’évolution de circonstance en cette année Darwin.
Le seul défaut de Manicore.com est de ne pas être un blog, donc de ne pas offrir de flux RSS pour être informé des nouvelles publications (il y a bien un vieux système de newsletter…) Aussi ai-je utilisé le service gratuit de Page2RSS.com* pour créer un flux RSS à partir de la page web listant les nouveautés, et ça marche ! Le flux des nouveautés de Manicore est ici.
(*avant j’utilisais PonyFish.com mais ce service a été supprimé, puis FeedEyes qui ne marchait plus bien…)
Les livres:
- Hervé le Treut, Jean-Marc Jancovici, « L’effet de serre« , 2001 (réédité en 2004 ), Flammarion
- Jean-Marc Jancovici "L'avenir climatique" (2002) Seuil ISBN:9782020512350 WorldCat Goodreads Google Books
- Jean-Marc Jancovici, Alain Grandjean, « Le Plein s’il vous plait !« , 2006, Seuil (réédité en poche en 2008 )
- Jean-Marc Jancovici, « Le changement climatique expliqué à ma fille« , 2009
20 commentaires sur “Manicore”
Bonjour Mr Jancovici. Que pensez vous du physicien François Gervais ? Cordialement.
Bonjour.
Je ne suis pas Jean Marc Jancovici. Cet article lui est consacré.
La contribution des climatosceptiques comme Gervais a été de pousser à vérifier certains points et à mieux les communiquer.
Maintenant c’est fait et les climatosceptiques se taisent peu à peu car ils savent désormais qu’ils ont tort et qu’on ne les écoute plus.
merci du partage pour manicore, j’en avais dévoré pas mal de pages l’an dernier avant d’investir dans une voiture électrique. le site était très vieillot mais plein de contenu super pédagogue. il a depuis été intégralement retapé avec les articles récupérés https://jancovici.com/ ça met un sacré coup de jeune au tout et ça ne gâche rien 😉
Ah merci de l’avoir signalé ! C’est pas trop tôt … Et en plus il a un flux RSS , ajouté à http://www.inoreader.com/u/Dr.+Goulu pour le suivre de près.
Ces corrélations sont sans fondement, car à ma connaissance aucune statistique mondiale n’affecte aux pays dans lesquels ils sont réalisés(vrais paradis et toutes leurs déclinaisons)les parts de PIB qu’ils permettent pourtant aux principales fortunes mondiales de réaliser, et, j’insiste là dessus, à performance énergétique magnifique.
Ce serait d’ailleurs un exercice amusant et instructif.
On parie qu’il ne sera jamais réalisé ?
Bon, tentons de clarifier votre pensée : un français planque 1 million d’Euros en Suisse. Cet argent est judicieusement placé, disons 25% aux USA, 25% en Europe, 25% en Asie et 25% dans l’industrie Suisse (Nestlé, Novartis, Swatch etc) et rapporte 10% d’intérêts soit 100’000 Euros annuels à notre client, pardon : fraudeur. La banque prend 20’000 euros de frais de gestion. 35% du rendement net, soit 28’000 Euros sont prélevés comme « impôt anticipé » et reversés à l’Etat français même si le capital n’a pas été déclaré (le saviez-vous ?), ce qui laisse un peu plus de 5% de rendement net à notre client fraudeur.
Sur ce petit exemple qui me semble assez réaliste (j’ai des amis gestionnaires de fortune), quelle est la part du million que vous estimez correspondre à une part du PIB suisse qui devrait être créditée à la France ?
A mon humble avis, ce sont les 20’000 Euros correspondant à la valeur ajoutée apportée par les services de la banque, rien de plus (et donc inclus dans la statistique sur le secteur tertiaire dans la corrélation ci-dessus). Tous les autres montants auraient été identiques si l’argent avait été placé ailleurs, y compris en France, à part probablement le montant de l’impôt, inclus dans une autre corrélation plus haut.
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_de_la_Suisse#Banques contient quelques chiffres intéressants.
Me permettrai-je de suggérer que la classement mondial des pays de haute efficacité énergétique auquel Dr Goulu se réfère me paraît singulièrement fantaisiste.
Les premières places me semblent devoir être trustées (sans calcul, mais avec une bonne chance de n’être pas contredit) par les paradis fiscaux qui ont réussi la prouesse de réaliser du du profit (et donc du PIB) directement par des boites à lettre qui sont (toutes les études sur le sujet le confirment) très peu émettrices de CO2. Il est vrai que ce PIB délocalisé , basé sur l’autofécondité de la monnaie, réalise de très mauvais scores quand ses titulaires passent ensuite dans le monde réel.
Dans cette perspective,le très bon classement de la Suisse ne saurait surprendre…
Dans un monde plus réel pour faire vraiment mieux que la Nouvelle Guinée, je ne vois guère que la création d’un Etat intégralement dédié aux apnéistes
La bonne performance de nos amis helvètes
hypothèse intéressante sentant bon les préjugés, donc vérifions.
La corrélation entre PIB/POP et CO2/POP est bien connue. Et là le « paradis fiscal » Suisse (je vous parlerais de mes impôts un jour…) ne se distingue de l’enfer fiscal voisin que par un revenu plus élevé, mais se distingue bien de Singapour par une production de CO2 très nettement moins élevée.
Mais allons plus loin, corrélons avec la part de tertiaire dans l’économie : oh! tiens, quelle surprise … Le « pays des banques » a un secteur tertiaire moins développé que celui des « mangeurs de grenouilles » !
Bon, alors les « paradis fiscaux » on doit bien pouvoir les détecter par le taux d’imposition global, n’est ce pas ? Corrélons encore. La relation n’est pas évidente: l’émission de CO2 n’a pas grand chose à voir avec les impôts. Mais si ce sujet vous intéresse, regardez la distance France/Allemagne …
Bref, malgré toute mes efforts et ma bonne volonté je ne trouve pas de faits validant votre intuition. Peut-être faudrait-il envisager la possibilité de l’éventualité que certains pays soient moins bien gérés que d’autres ? Peut-être que la lecture de https://drgoulu.com/2009/04/03/combien-vaut-1-franc/ relativisera l’importance du secret fiscal…
Je n’ai encore pas trouvé les traductions anglaises des ouvrages de J.M. Jancovici.
Oui le site manicore est vraiment très riche. Il y a longtemps que je l’ai mis en tête de mes liens favoris dans mon propre blog.
Je conseille en particulier les leçons sur l’effet de serre et les conférences faites à l’école des mines.
Je suis tout à fait d’accord sur la richesse du site, et sur la bonne façon de poser le problème énergétique global.
L’exception concerne l’effet de serre pour lequel les informations sont à tout le moins « blettes » quand elles ne posent pas problème, sur la nature même de l’effet sinon sur les façons de le traiter dont vous pourrez voir sur le site
http://www.pensee-unique.fr/effetdeserre.html
qu’il y a matière à s’interroger et développement récents (occultés par la discussion publique autorisée?)
Jean-Marc Jancovici m’informe que le nom de sa société « Manicore » vient de la ville de Manicoré en Amazonie (Brésil) et pas d’un monstre mythologique, le Manticore, dont j’ai par conséquent enlevé l’image.
@Krysztof : c’est ça, on a monté un système économique basé sur la croissance de la consommation et de la population, et les deux sont liées : plus de bébés survivent si on peut leur donner à bouffer. C’est ainsi que la population mondiale est passée de 1.65 milliards en 1900 à 6.06 en 2000.
Là en « décroissant » la consommation de ressources, on va avoir un problème si la population ne décroit pas avec. On risque de voir très clairement quelles zones sont surpeuplées : celles où on crèvera de faim.
Une « économie durable » peut fonctionner pour 1 milliard de riches ou pour 10 milliards de miséreux (c’était Haroun Tazieff qui disait ça si je me souviens bien). Parce que le risque est réel que toutes les belles économies d’énergie que nous pourrions faire soient bouffées par une augmentation de la pop.
Si la population a augmenté d’un facteur 3.6 en un siècle, elle peut diminuer lentement d’un facteur 2 le siècle prochain, en même temps que la consommation d’énergie fossile diminue d’un facteur 2 par personne, ce qui donnera une réduction d’un facteur 4 au total dans un siècle. C’est pas « TOUT DE SUITE », mais ça me parait possible et raisonnable.
Bonjour,
Le problème de la montée de la natalité remue certes quelques vieux fantasmes (du genre crainte de l’invasion étrangère, besoin de nombreux soldats pour faire la revanche de 1870, gloriole de redevenir l’état le plus peuplé du continent comme au temps de Louis XIV…) mais avec 2,1 enfants/femme on est loin de l’expansion incontrôlée.
En fait, on serait plutôt content de ne pas voir se profiler le spectre du manque de jeunes pour payer les retraites des vieux, comme en Allemagne, dans les pays de l’est… voire en Chine bientôt.
Il y a trois problèmes avec la dépopulation :
1) c’est toujours le problème des autres (l’immigré, l’Africain, le chômeur…)
2) elle va à l’opposé de toutes les tendances humaines lourdes (faire des enfants, quand on y pense, c’est cauchemardesque, coûteux, et pas une assurance retraite terrible ; si tout le monde le fait c’est qu’on est câblés pour),
3) par définition, elle entraîne la disparition des gens raisonnables et responsables 🙂
Sans compter que la réduction de la population va se sentir au mieux à l’échelle du siècle, alors que le problème de l’énergie doit être résolu TOUT DE SUITE !
Mécaniquement, le niveau d’instruction et la protection sociale réduisent le nombre d’enfants. Aucun investir à fond de ce côté dans les endroits où il y en a besoin. (Et on ne parle pas assez de l‘effondrement de la natalité dans nombre d’endroits du Tiers Monde même s’il reste du chemin à parcourir.)
Oh si on est encore en plein dans l’explosion démographique, c’est même et de loin la principale menace pour le mondeDe2000 à 2050 nous allons « gagner » 3,5 milliards d’habitants soit autant que de 1950 à 2000. La réduction du taux de croissance ne se traduit pas par une baisse de la croissance car la base est de plus en plus large. Même pauvres et vertueux les hommes prennent de la place et notamment celle de toutes les autres espèces.
Le pb des retraites à coté c’est une plaisanterie et de toute façon il faudra l’aborder un jour, alors mieux vaut avec 3 milliards de personnes agées qu’avec 12 milliards non ? Le monde n’est pas menacé par la dénatalité,avez vous déja vu la courbe de croissances sur les 10000 dernières années ? C’est un cauchemard.
@Vincent : comme je n’ai aucun moyen de convaincre les chinois d’acheter de l’uranium à l’extérieur plutôt que de bruler leur propre charbon pendant les 3 prochains siècles, la question du contenu CO2 de mon téléphone portable n’est pas mon problème, mais le leur.
Chaque pays cherche une solution à l’équation de Kaya qui permette de maintenir, voire d’augmenter le PIB/POP. Les états qui ne sont pas auto-suffisants en énergie ont tout intérêt à agir sur leur efficacité énergétique, et ceux qui ne sont pas auto-suffisants en bouffe doivent limiter leur population, de gré ou de force. Et dans ce domaine, la Chine a fait très fort…
Bonsoir, je tombe par hasard sur votre billet.
Pour l’équation de Kaya à l’échelle planétaire, il n’y a pas de choix autre possible. Vive les maths !
En effet, votre réflexion entre les intensités énergétiques des économies de la Suisse et de la Chine oublient que la Suisse n’est ni auto-suffisante en alimentation, ni auto-suffisante en produits manufacturés. Devinez d’où viennent les i-phone achetés par nos amis suisses ?
Merci pour la référence à manicore.com
Ca fait longtemps que Jancovici est dans mes favoris. En plus le type est pédagogue … ce qui ne gâche rien