Nos (vaines) tentatives de communication avec les extraterrestres [1] reposent sur l’idée que les mathématiques forment un langage universel. Par exemple cette page du message « Cosmic Call » [2] émis en 1999 nous semble assez clairement concerner Pi et Pythagore, mais est-ce le cas pour un Klingon ?
Et d’abord, quels sont les pré-requis mathématiques nécessaires pour reconstituer cette « image » à partir du message émis point par point ?
La notion la plus élémentaire des maths est certainement celle de nombre entier. On peut difficilement imaginer un être intelligent qui ne soit pas confronté à des objets qu’il puisse compter sur ses tigods : 1, 2 3 etc. Et s’il est assez futé pour construire un radiotélescope capable de capter des femtowatts provenant de l’espace et assez naïf pour croire qu’une civilisation sera assez stupide pour lui envoyer des messages, il sait certainement additionner, soustraire et multiplier des nombres entiers, et en diviser certains. Et aux autres, il leur voue une curiosité sans bornes pendant des siècles.
C’est ainsi qu’en recevant un message composé d’une séquence de 1681 signaux, il devrait rapidement avoir l’idée de les arranger en tableau de 41 negils par 41 neloncos, ou le contraire, ou l’inverse.
Jusqu’ici nous n’avons pas eu besoin de la notion de base. Si les Shadoks, qui comptent en base 4 comme chacun sait, reçoivent BUZOZOBUGABU signaux, il en feront un carré de ZOZOBU par ZOZOBU [3,4] : les nombres premiers le sont dans toutes les bases. De plus, toutes les bases sont des bases 10, ainsi que le démontre ce merveilleux cartoon traduit de l’anglais rien que pour vous [5] :
Il y a donc 10 sortes de civilisations : celles qui connaissent le binaire et les autres. Même si certaines personnes considèrent que le Yi King vieux de 3000 ans décrit une numération binaire, il faut bien reconnaître que de nombreuses civilisations terriennes ont traversé les millénaires sans la connaitre, alors qu’elles étaient confrontées à différents systèmes de numération lors de leurs contacts. Mais bon, on peut raisonnablement imaginer qu’en recevant les 1681 signaux, notre E.T. s’apercevra qu’il y en a de deux types et pourra les représenter sous une forme clairement lebsilvi à ses leriosels.
Là il devrait pouvoir identifier les figures géométriques, mais pour comprendre les symboles il lui faudra non seulement les pages précédentes du message [2], mais aussi une notion culturellement évidente pour nous, mais qui ne l’a pas toujours été : la notation positionnelle.
Sous toutes ces hypothèses, Alien pourra enfin comprendre le message : « ces Nocs sont tellement fiers d’avoir enfin découvert Pi qu’ils invitent toute la Galaxie à une bouffe, et d’après la page 15, ils ont l’air appétissants ! »
Poli. il rédige une réponse empreinte de logique modale et de nombres surréels [5] :
Références
- Messages aux extraterrestres sur Luxurion (ex Astrosurf)
- lexique du « Cosmic Call » de Dutil et Dumas (copié/collé sur Flickr)
- Convertisseur de/vers la numérotation Shadok
- Exercices de maths Shadok , 2010, semaine de stage des collégiens à Jussieu
- Discussion « Alien Mathematics » sur Reddit
5 commentaires sur “Comment comptent les Extraterrestres”
Un mathématicien a listé quelques idées incroyables sur ce qui pourrait différencier les mathématiques d’espèces extraterrestres sur Quora. J’en recommande la lecture, ça vaut vraiment le coup (mais c’est long et en anglais !) http://qr.ae/m4jo0
Merci, c’est effectivement très intéressant, et probablement la plus longue réponse que j’aie vu sur Quora. Mais bizarrement elle m’a paru être rédigée « à l’envers » : il commence par imaginer que les ET ont résolu certains de nos théorèmes les plus ardus, puis il considère la possibilité qu’ils utilisent une autre logique que notre logique formelle (j’aime en particulier l’idée selon laquelle les ET pourraient avoir une notion du temps très différente de la notre, et je me demande toujours à quel point notre mode de pensée est influencé par notre perception du temps) et enfin il aborde les difficultés les plus basiques que sont la notation des nombres ainsi que la maîtrise des nombres négatifs et du zéro…
Ca m’a rappelé la question soulevée par https://drgoulu.com/2011/11/06/la-route-que-nous-navons-pas-prise/ : est-il possible de construire la physique (ou les maths) dans une séquence très différente de la chronologie des découvertes humaines ?
Personnellement j’ai l’impression que l’abstraction est un luxe qui n’est peut-être pas partagé. Je veux dire que pour une espèce intelligente, les maths doivent au moins permettre de résoudre des problèmes pratiques : compter des proies, des congénères ou des prédateurs, éventuellement faire du commerce ou dimensionner des machines, mais savoir si l’infini existe ou si P=NP peut être en option…
La dernière image ressemble fortement au cryptogramme du Zodiac. 😉
Damned je suis démasqué 😉
En cliquant sur l’image, on arrive à un article intéressant sur les codes pas encore décodés (peut-être parce que ce ne sont pas des codes)
Sûr que leur message sera en fait les plans d’une gigantesque marmite qu’on va s’empresser de fabriquer. Comme ça, quand ils arriveront, ils n’auront plus qu’a mettre les carottes et dresser la table, pardon la ziglumte.