Après le tour du monde de SolarTaxi et les premiers vols de Solar Impulse qui prépare le sien, voilà que Planet Solar lève l’ancre pour boucler la première circumnavigation à l’énergie solaire. 20 ans après Spirit of Biel, les Suisses semblent toujours aussi passionnés de véhicules solaires jusqu’à imaginer un sous-marin solaire, tandis que d’autres se lancent dans le dirigeable Sol’r ! Désormais, si vous voulez vous aussi promouvoir l’énergie solaire en vous promenant dans un véhicule original, il ne reste que SolarTrottinette…
Je me demande si ces projets permettent réellement de faire avancer le schmilblick. Est-ce que ces engins préfigurent vraiment les véhicules de nos petits enfants ? J’ai des doutes…
D’abord, une évidence parfois oubliée : un véhicule « solaire » est en fait un véhicule à propulsion électrique dont la batterie est rechargée par des panneaux solaires. La propulsion électrique, on sait faire depuis assez longtemps, et ces dernières années ont permis de disposer des panneaux à rendement acceptable et des batteries à hautes performances nécessaires.
Au niveau des véhicules il n’y a pas de conception fondamentalement nouvelle : l’avion a deux ailes et des hélices, la voiture à des roues et le bateau a des coques. C’est la faible puissance des cellules photovoltaïques qui conditionne la construction de ces engins : il faut de grandes surfaces et une extrême légèreté car le but essentiel est d’avancer en utilisant un minimum de puissance.
Ainsi, Solar Taxi ne consomme que 8 kWh/100 km en moyenne, soit l’équivalent de 0.8 l/100km. C’est donc une « voiture » plus proche de la classe « Urban Concept » de l’Eco Marathon Shell que de la Golf des Taylor.
Sur le site de Solar Impulse, on trouve cette comparaison remarquablement honnête :
Avec 200 m2 de cellules photovoltaïques et 12 % de rendement total de la chaîne de propulsion, la puissance moyenne fournie par les moteurs de l’avion n’atteint plus que 8 CV ou 6 KW.. C’est à peu de chose près ce dont disposaient les frères Wright en 1903 lorsqu’ils ont réalisé le premier vol motorisé.
Si Solar Impulse peut envisager un tour du monde alors que les frères Wright ne volèrent que quelques centaines de mètres, c’est grâce au progrès de l’aéronautique qui permettent de réaliser aujourd’hui un moto planeur aux performances étonnantes plus que grâce au solaire. En effet, si au lieu d’embarquer 400 kg de batteries, un « Petrol Impulse » équivalent chargeait 400 kg de kérosène, il pourrait voler environ 1000 heures avec des moteurs de même puissance (et chauffer l’équipage et ses repas en prime…), donc également boucler un tour du monde sans escale.
Le projet que je trouve le plus incompréhensible est celui de Planet Solar. Quelle drôle d’idée de construire un bateau solaire, alors qu’on fait déjà des circumnavigation à l’énergie renouvelable depuis presque 500 ans ! Des voiliers en bois ont transporté des centaines d’hommes et des tonnes de marchandises dans les eaux dangereuses des mers du sud pratiquement sans prévisions météo. Comment peut-on considérer comme un progrès de faire un tour du monde par les canaux de Panama et de Suez sur un bateau léger dont toute la surface est occupée par des panneaux ? Où est donc l’innovation dans ce projet ?
Pourtant il existe des idées innovantes pour la navigation, comme tracter des cargos avec des kites, ou soulever un bateau hors de l’eau sur des hydrofoils pour qu’il aille très très vite.
Même si je reconnais volontiers la performance technique de réaliser des véhicules consommant très peu d’énergie et que je souhaite plein succès aux équipes dans leurs projets, j’ai de la peine à partager des « rêves » basés sur de vieilles idées additionnées de rationnement de l’énergie. Un vrai rêve pour moi, ce serait plutôt d‘aller vite et loin, et pourquoi pas à la voile et au solaire en même temps …
4 commentaires sur “Solar machins”
On n’est obligé de commencer par quelque chose si l’on veut avancer. Heureusement que pas tous les êtres humains n’ont l’esprit aussi étroit que le vôtre, sinon nous serions encore à l’age de pierre.
pour moi « avancer » c’est aller quelque part où on n’a pas encore été. Refaire ce qu’on a déjà fait un siècle plus tôt, ça s’appelle reculer, et c’est dans cette direction que se trouve l’âge de pierre, dont le silicium est un composant essentiel 🙂
Bonjour Doc.
Je me permets une petite parenthèse amusante et culturelle. A Pouilly-en-Auxois (France) existe un bateau destiné à promener des visiteurs sous la voute d’un tunnel du canal de Bourgogne. Cet ouvrage remarquable (3,3 km de long) permet aux bateaux de franchir une crête qui constitue la ligne de partage des eaux entre les bassins de la Seine et du Rhône. Ce bateau fonctionne… à l’énergie solaire ! ! ! En effet, le bateau recharge ses batteries lors des escales à ciel ouvert. Je trouve que dans ce cas, le choix du solaire est plus approprié que la voile ! ! ! Par mauvais temps, le bateau est rechargé par une micro-centrale hydro-électrique qui, par le passé, alimentait un toueur électrique destiné à tracter les chalands sous la voute puisqu’ils ne pouvaient pas être halés par des hommes ou des chevaux.
Pour plus d’infos :
http://www.cotedor-tourisme.com/index.php?lg=fr&rub=10&id_objet=ASCBOU0210000047§ion=detail
http://www.bateau-electrique.fr/?page=modeles_det&id=53
A bientôt et merci pour l’article.
Décidément Dr Goulu, jamais de langue de bois avec toi !
Je partage à peu près ton avis sur les « fausses bonnes idées d’innovation » à un bémol près : Planet Solar peut inciter les constructeur à envisager de produire en masse des bateaux aux carènes de voiliers mais à propulsion électrique, rechargée par panneaux solaires et autres éoliennes : ça ferait moins de bruit, moins de remous, moins de flaques d’huiles et de fioul sur nos mers, et ça serait tellement, tellement sympa pour tout le monde !
Oui, je sais, il y en a toujours qui se régaleront à embêter leurs congénères avec du bruit, de la pollution, des vagues etc. mais moi aussi j’ai le droit de rêver, non ? O:-)