La Terre est sphérique, orbite autour du soleil en un an, et en 24 heures elle tourne sur elle-même autour d’un axe incliné d’environ 23.5° par rapport à la perpendiculaire au plan de l’écliptique. Ceci produit les saisons, comme l’explique très bien ce joli simulateur, mais fait aussi varier la durée du jour de manière assez complexe, pour autant qu’on définisse le jour comme l’intervalle de temps entre un lever du soleil et son coucher suivant.
Sous nos latitudes, la durée du jour est certes plus longue en été qu’en hiver, mais dans les régions polaires, le soleil ne se couche pas pendant plusieurs semaines, voire mois. Ce long jour polaire est un phénomène spectaculaire, comme on le voit dans cet accéléré qui suit le soleil pendant une semaine:
Ceci ne se produit qu’en Antarctique ou dans le cercle polaire arctique en bleu sur la carte ci-dessous, où l’on voit que nous autres européens sommes très favorisés pour aller contempler le soleil de minuit. Il nous suffit d’aller au nord de la Scandinavie, jusqu’au Cap Nord situé à 71° de latitude nord, accessible par route ou par bateau.
Pourtant, quand j’y étais le 3 août, le soleil faisait déjà une sieste d’environ 4 heures, juste sous l’horizon après un coucher de soleil qui a bien duré une heure. Alors, comment connaitre les dates entre lesquelles le soleil de minuit est observable, ou la latitude à laquelle il faut se rendre à une date donnée pour l’observer ?
En tenant compte de l’astronomie, mais pas des effets atmosphériques qui font qu’on voit encore le soleil même lorsqu’il est un peu en dessous de l’horizon, la formule approximative de la durée du jour est [1,2,3] :
\(D = -\frac{24}{\pi}.\cos^{-1}\left( \tan \lambda \tan\left( \sin^{-1}\left( \sin \alpha \sin \delta \right)\right)\right)\)
où α est l’inclinaison de l’axe terrestre ( 23.5° ), λ la latitude du site et δ l’angle parcouru par la Terre sur son orbite depuis sa position à l'équinoxe de printemps, environ égal au nombre de jours depuis l’équinoxe x 360°/365
en traçant cette fonction pour différentes latitudes, on obtient ce graphique :
La situation est assez spéciale aussi aux cercles polaires (±66.55°) : la durée de leur jour y varie linéairement toute l’année, avec un seul soleil de minuit au solstice d’été et une seule nuit de 48h au solstice d’hiver.
Au delà des cercles polaires, la durée du jour varie de façon très abrupte, ce que l’on peut comprendre si l’on considère qu’aux aux solstices d’été et d’hiver, les rayons du Soleil sont tangents à la Terre sur le cercle polaire. A partir de là, une augmentation de l’angle de l’axe de la Terre par rapport aux rayons du soleil de 1° (qui survient en environ une semaine) suffit à faire plonger le soleil de 1° sous l’horizon à minuit, mais comme il ne s’élève qu’à 23° dans le ciel à midi, la « nuit » dure plus d’une heure.
Pour voir le soleil de minuit en août, il eût fallu* aller au Svalbard, archipel mieux connu par le son île principale Spitzberg située non loin de 80°N. Et en y restant de fin août à fin octobre, on peut y vivre la spectaculaire plongée de la durée du jour de 24h à 0 en un peu plus d’un mois, qui précipite ces latitudes dans la nuit polaire, bleue avec des aurores boréales vertes… (ajouté aux todo…)

Note * : le passé antérieur conditionnel passé 2ème forme en jette moins que l’ imparfait du subjonctif, mais quand même 😉
Références et liens
- « Durée du jour » sur Wikipédia
- « Durée du jour en fonction de la date et de la latitude » sur maths au quotidien
- Xavier Hubaut, « Mathématique du secondaire – Le jour et la nuit«
- François Lagarde, « Les saisons, les tropiques, le cercle polaire«
- Day and Night World Map : carte du monde avec zones jour/nuit
- Jour et nuit au cours d’une année : application didactique pour iPad
- pyephem, un package Python qui permet des calculs d’éphémérides astronomiques précis.
10 commentaires sur “Combien dure un jour”
Bonjour,
Comme d’habitude article très instructif et pédagogiquement argumenté. Merci.
Par contre, il eût fallu utiliser le conditionnel plutôt que le passé antérieur dans votre phrase « Pour voir le soleil de minuit en août, il eut fallu aller au Svalbard ». En effet, vous auriez dit en langage parlé : « Pour voir le soleil de minuit en août, il « aurait » fallu aller au Svalbard … au conditionnel passé 1ère forme. Ce qui donne il « eût » fallu au conditionnel passé 2ème forme, peu usité à l’oral, mais qui « en jette » à l’écrit.
Mais ceci n’enlève rien à l a valeur de votre article.
Amicalement.
Vous avez absolument raison, le ^ fait toute la différence, merci pour votre correction.
Ok, deux todo ajoutés.
Dans les articles « vacances » pourrait-on avoir une explication sur l’eau qui ne « tourne » pas dans le même sens dans les hémisphères Nord ou Sud. J’ai eu la chance de l’observer en passant l’Equateur… mais le bateau allait trop vite pour que l’on se rende compte de ce que faisait l’eau à l’Equateur exactement.
(désolée si ça déjà été blogué…)
Bienvenue funambuline! (joli pseudo 🙂 )
Si l’eau du lavabo de votre bateau a subitement changé de sens de rotation au passage de l’Equateur, vous avez été témoin d’un authentique miracle !
La force de Coriolis est bien trop faible pour avoir de l’effet dans un lavabo, elle ne se manifeste que sur des phénomènes océaniques (courants) ou atmosphériques (vents autour des hautes/basses pressions) très étendus.
Mon estimé confrère du C@fé des sciences Sirtin avait blogué là dessus http://www.sirtin.fr/2012/04/25/le-tourbillon-de-la-baignoire-est-un-mythe-tenace/
Elle n’a pas subitement changé. Le bâteau devait donc être penché différemment, je suppose. Merci pour le lien ! (Et le compliment 🙂 )
En effet et je ne vois pas ce qui empêche les calculs pour ces zones, je comprends que les imperfections de la terre et les tangente rendent les calculs faux mais on pourrait les afficher ?
Je pense que ça vient du fait que le calcul se base sur des périodes de 24h, comme avec la formule dans mon article. Si le coucher (ou lever) de soleil a lieu à une date ultérieure (ou antérieure), avec cette formule il faudrait incrémenter (ou décrémenter) δ de 1 jour jusqu’à ce que la formule renvoie une valeur intermédiaire entre 0 et 24.
Ou alors trouver une formule qui calcule directement le prochain coucher (ou lever précédent) sans tenir compte de la période de 24h. Le graphique de cette fonction n’aurait pas de « plats » à 0 et 24h mais les courbes se prolongeraient en faisant des paliers correspondant à la durée du jour/nuit polaire, allant jusqu’à 6 mois aux pôles…
un site très bien réalisé (un graphique résume la position du soleil dans la journée pour un an à un endroit donné) pour connaître ce genre d’informations (la piscine de mon immeuble à Bangkok n’est ensoleillée que 6 mois par an)
http://www.suncalc.net
Merci beaucoup pour ce lien, très bien fait en effet !
Il utilise les formules données ici combinées avec Google Map, du très beau JavaScript ! Toutefois je trouve les résultats en zones polaires améliorables, alors j’ai proposé cette amélioration. Votez Pour !
Proposition pour un sujet d’article connexe: les heures de lever du soleil, ou l’on decouvre que le jour le plus court n’est pas le jour ou le soleil se leve le plus tard… ni ne se couche le plus tot! Au moins a nos latitudes.
Merci pour vos articles, toujours instructifs!