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L’initiative 1:12 est extrémiste au sens propre : en voulant limiter le rapport entre les salaires le plus élevé et le moins élevé de chaque entreprise, elle ignore la très large majorité qui se situe entre deux.
Le coefficient de Gini mesure bien mieux les inégalités car il tient compte de tous les revenus, et c’est lui qui est utilisé pour les comparaisons internationales. Pour la Suisse il vaut 0.29 après impôts et prélèvements obligatoires, et 0.34 avant, ce qui est étonnamment faible.
Selon le dernier rapport de l’OCDE sur les inégalités [1, p.9]:
Les pays nordiques et la Suisse se caractérisent par une inégalité des revenus disponibles inférieure à la moyenne grâce à une faible disparité des salaires, en particulier au sommet de l’échelle.
Même si ça peut surprendre, la Suisse est dans le groupe des pays les plus équitables de l’OCDE, caractérisés par une « Faible dispersion des revenus du travail (taux d’emploi élevé et faible dispersion des salaires) » [1, Fig 6 p.12]. De plus, au contraire de nombreux pays, les inégalités n’augmentent pas notablement en Suisse : la part des revenus allant aux 10% des revenus les plus élevés en Suisse est restée assez stable entre 1933 et 2008 [3]
L’extrémisme de l’initiative 1:12 ne garantit pas des revenus plus équitables. On peut facilement calculer qu’une entreprise de 10 personnes seulement dans laquelle le patron se verserait un salaire 12 fois plus élevé que ses 9 employés a un coefficient de Gini de 0.52, au niveau du Mexique ou du Chili. Malheureusement, les entreprises ne calculent pas ni ne publient leur coefficient de Gini, qui serait pourtant un indicateur bien plus parlant que les rémunérations de leurs top managers.
En fait, il est très difficile d’obtenir une liste de revenus de quelque organisation que ce soit. Une exception notable est l’ATP, qui publie sur internet le classement des gains des 100 meilleurs joueurs de tennis mondiaux. On y voit que le ratio des gains entre le No1 ( Raphael Nadal ) et le No 100 ( Alejandro Falla) vaut 33, et on peut calculer que le coefficient de Gini de ces 100 revenus vaut 0.56, ce qui correspond à une distribution très inégale.
Et encore, c’est compter sans les revenus publicitaires, qui ont permis par exemple à notre Federer national d’empocher 66 millions en 2012.
Pourquoi donc sommes-nous choqués par le fait que quelques patrons d’entreprises employant des dizaines de milliers de personnes gagnent autant qu’un génie de la raquette ou du football ? Peut-être parce que nous ne réalisons pas que ces gens exceptionnels partagent un même talent : anticiper.
Percevoir tout ce qui influence le jeu, se mettre dans la peau de l’adversaire pour sentir ce qu’il va faire, repérer à l’instinct des « patterns » vus et entraînés des centaines de fois. Décider vite, sans hésitation alors qu’on sait qu’on ne maîtrise pas tout. « Je suis un entonnoir » m’a dit une fois un grand patron. « Vous me remplissez d’informations qui viennent de tous côtés, et parfois une goutte sort : on investit en Chine, ou au Japon. Je ne peux pas vous expliquer pourquoi… »
Au tennis, les meilleurs joueurs mondiaux ne se distinguent que par quelques pourcent de taux de réussite des balles, et nous payons ces écarts des millions, pour le plaisir. Dans le business, ce sont aussi quelques pourcents qui font la différence entre une entreprise saine et une moribonde, quelques pourcent de chômage qui font la différence entre pays… Ces pourcents ne valent pas des millions mais bien des milliards pour nous tous.
On ne paie pas les top managers pour leur travail mais pour leur talent, et pour qu’ils jouent dans nos équipes plutôt que dans celles d’en face.
Références
- OCDE 2012, « Inégalités de revenus et croissance : le rôle des impôts et des transferts », OCDE Département des Affaires Économiques, Note de politique économique, no 9, janvier 2012.
- OECD. Published by : OECD Publishing "Toujours plus d'inégalité : Pourquoi les écarts de revenus se creusent" (2012) OECD Publishing ISBN:9789264119550 WorldCat Google Books
- Ch. A. Schaltegger, Ch. Gorgas « L’évolution des très hauts revenus en comparaison internationale« , La vie économique, décembre 2012
62 commentaires sur “1:12, le prix du talent”
combien font 1 talent en euro ?
question marrante. Je la prends au premier degré : le talent correspondait à 60 mines ou 6000 drachmes, soit 25.86 kg d’argent. Comme 1kg d’argent vaut environ 455 Euros, le talent valait donc environ 11766 Euros.
Le talent, c’est pas donné…
Article sur les inégalités en Suisse : http://www.bilan.ch/economie/les-salaires-sont-plutot-bien-repartis-en-suisse-0
Et toujours par Alexandre Delaigue, voici un lien vers son dernier billet qui m’a immédiatement fait penser à la discussion en cours :
http://blog.francetvinfo.fr/classe-eco/2013/11/10/standard-poors-et-lerreur-dattribution-fondamentale.html
« Mais on commet surtout l’erreur d’attribution fondamentale. Les performances de l’économie française sont déterminées par les circonstances, le contexte, bien plus que par la compétence de ses dirigeants politiques, quels qu’ils soient (heureusement sans doute). Nous avons tendance à surestimer le poids des politiques suivies, alors que leur influence est en pratique impossible à distinguer. »
Oui j’aime bien Delaigue, mais là je trouve la fin de son article un peu parachutée… Pour rester sur cet extrait (qui ne mentionne que les politiques, pas les PDGs…)
D’abord, que sont les « circonstances » et le « contexte » sinon le résultat (partiel du moins) des actions ou inactions passées ? L’Allemagne a aussi des « circonstances » et un « contexte » avec des conséquences bien différentes… Faudrait-il croire à la prédestination des nations? des entreprises ?
Mais surtout si « leur influence est en pratique impossible à distinguer », alors comment sait-on que nous « surestimons le poids des politiques suivies » ?
Combien seriez-vous prêts à payer pour avoir une Merkel à la place d’un Hollande ? 1 Euro par habitant et par an ce serait trop ?
Ce débat me rappelle un cours de fac d’économie avec une prof marxiste sur la valeur. J’étais partagé entre deux théories de la valeur. L’une d’inspiration chrétienne et marxiste attribue la valeur des choses au travail accumulé. Tant de quantité de travail pour produire un bien lui confère telle valeur. L’autre conception dénie une valeur intrinsèque aux choses et ne considère qu’une valeur vénale déterminée par un marché.
Cette deuxième conception prend petit à petit le pas sur la première et s’applique de plus en plus aux hommes. La valeur marchande d’un homme n’est plus déterminée par la quantité de travail qu’il a « accumulée » pour acquérir sa compétence mais par le marché. C’est peut-être regrettable mais c’est comme ça.
Hollande et Merkel ont du faire autant d’années d’études valent-ils autant ?
En fait, question bête, mais pourquoi ce chiffre 12 ?
Comme il fallait un chiffre, l’idée était que le directeur ne gagne pas plus en un mois qu’un employé lambda en une année. Seuil psychologique ?
Dr Goulu
D’abord merci d’avoir cassé mon idée reçue au sujet de l’interdiction de brûler un billet de banque. Je vérifierais donc, mais bon, ce n’est pas non plus mon activité principale…
Au sujet de votre question précise (C’est vrai que les commentaires, dont les miens, s’égarent un peu) : « Pourquoi donc sommes-nous choqués par le fait que quelques patrons d’entreprises employant des dizaines de milliers de personnes gagnent autant qu’un génie de la raquette ou du football ? » Ces sommes d’argent délirantes choquent beaucoup de monde, dont moi, je l’avoue. Par contre bon nombre de ces gens choqués acceptent volontiers les salaires démesurés de certains footeux, tennismen,
stars du ciné etc. Pourquoi donc ? Et vous proposez une réponse : « Peut-être parce que nous ne réalisons pas que ces gens exceptionnels partagent un même talent : anticiper. » Votre réponse semble logique. Ces gens sont exceptionnels, ils sont rares, d’accord. Ont-ils un véritable talent, qui serait l’anticipation ? Pour les joueurs d’échec, c’est sûr. Pour les tennismen, les chefs d’entreprises, peut-être, mais pas sûr. Je crois personnellement qu’il n’en est rien. Les uns sont habiles avec une raquette, ils peuvent placer une balle sur un timbre poste, ils s’entraînent dur pour ça. Les autres possèdent un certain « sens des affaires » ajouté à un certain charisme, bagout, culot… capable de charmer des foules et de les enrôler dans leurs projets. Je n’appelle pas ça de l’anticipation. Appelons toutefois ce genre de faculté un talent. Ce talent explique t-il leur réussite ? À savoir, être classé dans les 10 ou les 100 meilleurs… En partie, oui probablement. On a un peu parlé du hasard. Vous reconnaissez vous-même qu’il joue son rôle dans leur réussite. J’ai déjà tenté d’expliquer que le fait même que ces gens possèdent un quelconque talent, n’était déjà que le fruit du hasard. Il ne peut donc y
avoir de mérite, c’est là mon point de vue. J’admets par contre que ces gens semblent être dotés d’une volonté supérieure à la normale. D’où leur vient cette volonté ? Vous avez deviné ma réponse… toujours le hasard.
Maintenant à votre question initiale, je vous propose ma réponse. Le vulgum pecus ne réfléchit pas bien loin, vous le savez. Tout est fait pour l’amener à penser du prêt à penser. On a beau lui expliquer que les patrons prennent des risques, que c’est en anticipant et en osant qu’ils lui font et lui assurent le meilleur des mondes, qu’il n’a
qu’à leur faire confiance, et pourquoi pas à les imiter… malgré ça, il persiste à croire que le monde est profondément injuste. La réalité quotidienne lui dit que ces discours sonnent faux. Un exemple, les prochains JO en Russie. Alors il préfère s’occuper l’esprit avec des choses plus faciles à comprendre, des choses plus distrayantes, qui lui font finalement du bien, comme le foot, le tennis, les stars… les jeux du cirque. Et ce n’est plus que dans ce milieu qu’il voit ses idoles. Sale temps, non ?
Sur le hasard dans la finance, un de mes collègues du C@fé vient d’écrire cet intéressant article : http://sciencetonnante.wordpress.com/2013/11/04/un-singe-ferait-il-mieux-que-votre-conseiller-financier/
Selon moi, un top manager prend non seulement des décisions du type acheter/vendre comme un financier, mais doit en plus les faire appliquer par une très grosse organisation. Si vous êtes membre actif de n’importe quelle association, vous savez que c’est difficile et que le hasard ne joue que peu de rôle.
Ne confondons pas le talent, le jeu et le travail. Même si elle serait difficilement applicable, l’initiative 1:12 pose une bonne question ! Je doute fort que le travail du patron de Novartis vale plus de 200 fois celui de l’employé le moins bien payé.
Justement, c’est le thème de l’article, mais peut-être que je ne l’ai pas mis assez en évidence : les salaires ne sont pas proportionnels à la valeur du travail. Ils ne le sont peut-être que pour les gens payés « à la pièce ». En haut de l’échelle, je postule que, comme pour les tennisman, être statistiquement meilleur de 1% que le concurrent peut donner un avantage décisif.
Peut-être que le coût des mauvaises décisions des Ospel, Bruggisser et consorts peut donner une idée de la valeur des bonnes …
Dr Goulu
Je vous avais envoyé un message pour vous répondre il y a quelques jours, mais il a dû se perdre dans les tuyaux. Je ne maîtrise pas bien cet outil de communication.
Vous vous acharnez à nous expliquer que nos hyper-talentueux patrons méritent d’être payés des sommes astronomiques. De toute façon, dites-vous, avec cet argent ils achèteront des yachts, des palaces, des montres suisses… et ainsi ils feront tourner l’économie, ils permettront à des ouvriers de travailler, etc. Je crois rêver. Comment quelqu’un de si brillant que vous, peut-il tenir des raisonnements aussi simplistes. Je vous disais que je préférais infiniment vos articles qui traitent de sciences dites dures, celles où vous semblez avoir de véritables compétences : les mathématiques, la
physique. Vous voyez l’économie avec ses « lois » comme vous voyez la physique avec les siennes. Vous semblez ignorer que l’argent pour certains est une drogue, qu’ils n’en auront jamais assez. En fait, vos raisonnements en matière d’économie sont ceux de quelqu’un de conditionné. Conditionné par votre rang social, votre histoire personnelle, etc. (ça ne m’intéresse pas) Pour vous l’argent semble ne pas être tabou. Nous avons ça en commun, moi non plus. Je vous propose une expérience. Si vous ne savez pas exactement à 100 euros près qu’elle est votre solde en banque (ce
qui est tout de même encore le cas pour beaucoup de monde, malgré la crise) brûlez donc un billet de 50 euros pour voir l’impression que ça vous fait. Dites-vous que ça ne vous rendra financièrement pas plus pauvre qu’avant, puisque vous ne connaissiez pas votre solde. Je sais c’est interdit de le faire, faut pas le dire. Vous avouez rêver d’un yacht, d’une Nissan Chépaquoi… Moi, je me fiche de tous ces trucs. J’aime la simplicité, la retenue, la décence, la sagesse. Nous n’avons certainement pas la même histoire.
Cher(e) Papimichel,
dommage. Si je n’ai pas réussi à vous convaincre que l’économie est une science presque dure, avec beaucoup de maths et un peu de psychologie, c’est que mon article n’est pas bon. Alors j’en écrirai un autre sur le B.A.-BA de l’économie un de ces jours.
En attendant je vous recommande de lire « Obelix et Compagnie » (je suis très sérieux, je l’ai donné à lire à mes filles en guise de B.A. – BA) et Economicon de Jean-Pierre Petit, une excellente BD qui introduit la plupart des notions de base de l’économie. Ensuite, vous pourriez parcourir http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_des_jeux pour découvrir certains des aspects les plus durs de l’économie qui résultent dans le fait que beaucoup des Prix Nobel d’économie sont en fait des Prix Nobel de maths.
Pour rappel, mon article contient à ma connaissance le premier indice de Gini jamais publié pour un groupe de 100 individus bien identifiés : c’est du dur. Pourtant ce n’est pas cet aspect que vous relevez, ni vous ni les autres lecteurs. Vous y voyez une dimension politique qui n’y est pas.
Par exemple, je n’ai jamais dit que les hauts salaires sont mérités (cherchez). J’ai posé une question » Pourquoi donc sommes-nous choqués par le fait que quelques patrons d’entreprises employant des dizaines de milliers de personnes gagnent autant qu’un génie de la raquette ou du football ? » et j’ai proposé une réponse possible : « Peut-être qu’ils partagent un même talent. ».
Quelle est votre réponse à vous à cette question précise?
A part ça il n’est plus interdit de brûler un billet de banque, et personnellement ça me ferait exactement le même effet que de casser un objet de la même valeur.
Jean-Pierre Petit n’est pas économiste, à ma connaissance. Je veux bien qu’il soit brillant, mais certaines de ses positions (sur l’ufologie, ou encore sur les thèses conspirationnistes) me laissent un peu perplexe. Certes, ça ne le discrédite pas forcément a priori, mais j’avoue que si je trouve le temps de lire son Economicon, je l’aborderai avec circonspection
Je trouve ses BD d’Anselme Lanturlu toutes très bien, peut-être parce qu’elles datent d’avant la période où il s’est mis à planer…
Le concept de talent chez les patrons n’est pas aussi simple que pour les joueurs de tennis. Au tennis, il y a plein de matchs entre joueurs qui permettent de décider raisonnablement qui a le plus de talent. Chez les patrons, cela n’existe pas. Comment dire qu’un patron est doué, a du talent ? Pour moi devenir patron de doit pas grand chose au talent, mais plutôt au réseau. Comme il est très difficile de mesurer le talent d’un patron, c’est une signe pour moi qu’être patron n’implique pas avoir du talent.
Effectivement, ce n’est pas aussi simple, donc pas aussi facilement compréhensible. J’ai choisi le tennis parce que c’est un jeu non linéaire, que les gains du top 100 sont transparents, et parce que les règles du jeu sont comprises par presque tout le monde. (par contre pour le classement c’est pas évident…)
A la base je voulais plutôt comparer les CEO à des joueurs d’échecs, mais le temps des Kasparov et Spassky me semble passé, et plus grand monde ne sait jouer aux échecs, ce qui est très dommage.
Pour comprendre le talent, il faut comprendre les règles du jeu, et le business c’est un peu les échecs contre plusieurs adversaires qui inventent de nouvelles pièces et de nouvelles règles tout le temps…
Mesurer le talent des managers est en fait assez simple : achetez une action de quelques boites autour de chez vous et allez aux assemblées générales (rien que ce que vous pouvez y manger paie souvent l’action…) : vous allez très vite voir lesquels sont mauvais (effectivement, être patron n’implique pas avoir du talent) et les quels sont bons au point de vous convaincre d’acheter une autre action, et les produits de l’entreprise. Oups, vous venez de contribuer à leur bonus…
Ce qui choque en France ce sont ces rémunération hors normes décidées par des comités dont les membres ont des intérêts croisés.
Ce qui étonne l’analyste, c’est qu’il y a quarante
ans les rémunérations de ces PDG étaient 4 ou 5 fois inférieures alors
que rien ne permet d’affirmer qu’ils étaient 4 ou 5 fois moins
talentueux.
L’analyste devrait se dire que si c’était général, les inégalités auraient du augmenter en France (surtout avec l’augmentation du chômage en plus) alors que ce n’est pas le cas : https://fr.wikipedia.org/wiki/In%C3%A9galit%C3%A9s_de_revenu_en_France#Depuis_50_ans
L’analyste devrait aussi se rappeler que le SMIC a également quadruplé en 30 ans ( http://www.smichoraire.net/evolution-du-smic/ )
Il devrait aussi noter que mon article suggère que la relation salaire(talent) des top managers est fortement non linéaire comme l’est celle des tennismen. Cette relation n’est linéaire que lorsqu’on est payé « à la pièce » tout en bas de l’échelle. En haut de l’échelle, être 1% meilleur que son concurrent peut valoir des milliards pour l’entreprise.
En conclusion, l’analyste devrait être moins catégorique dans ses affirmations et considérer que le phénomène est plus complexe qu’il ne le pense ( http://lexpansion.lexpress.fr/entreprise/zoom-sur-les-salaires-des-grands-patrons-hors-cac-40_392587.html ) 😉
Je veux bien croire que les inégalités de revenu disponible n’ont pas
augmenté en France, mais cela tient pour une grande part aux différents mécanismes de transferts sociaux (impôts, cotisations, allocations diverses).
En termes de patrimoine, je doute qu’il en soit de même.
En parallèle on remarque une évolution que les mathématiques ne peuvent
appréhender. Autrefois un patron d’entreprise publique gagnait 300 000 euros
en s’en trouvait bien car avec il avait avec les honneurs, le prestige de la fonction. Maintenant pour se sentir
suffisamment considéré, il lui faut 1 ou 2 millions.
Cela pour établir que la distribution
des revenus ne semble pas facilement corrélée avec la distribution des talents, que la relation soit linéaire ou non. Du moins si on observe la réalité dans la durée.. Selon les époques on accorde plus ou moins d’importance à l’argent.
« Si cette augmentation des salaires des dirigeants était générale, les inégalités auraient du augmenter en France (surtout avec l’augmentation du chômage en plus) alors que ce n’est pas le cas :https://fr.wikipedia.org/wiki/… »
Hmm, l’évolution du rapport interdécile D9/D1 ne me convainc pas. Je pense qu’il serait intéressant de regarder de plus près le rapport interpercentile P99/P1, et de le regarder sur une période courte (grosso modo ces 20 dernières années, qui me semblent avoir concentré et cristallisé ce phénomène de distorsion)
L’argument est développé au milieu du paragraphe « Depuis 1998 » de la page wikipedia citée (voir la note de bas de page 11, aussi : https://fr.wikipedia.org/wiki/In%C3%A9galit%C3%A9s_de_revenu_en_France#cite_note-11)
C’est justement le problème : le rapport interdécile D9/D1 ignore la distribution pour 80% de la population, le rapport intercentile ignore 98% de la population et le max/min ignore 99.998% des salariés d’une entreprise de 100’000 employés. Ce ne sont pas de bons indicateurs. En plus ils ne sont pas indépendants de la population : ces rapports seront statistiquement plus grands à Paris que dans un village de campagne, donc une partie de votre sentiment peut être du à l’augmentation de la population.
L’indice de Gini n’a pas ces deux travers, et lui est clair : il n’y a pas d’augmentation significative des inégalités en France.
Le rapport interdécile D9/D1 ne peut qu’augmenter du fait de la mondialisation. Les hauts salaires (managers, sportifs, acteurs…) « vendent » désormais leurs talents sur un marché mondialisé alors qu’avant ils le vendaient en national. Le haut du panier se trouve de ce fait tiré plus haut. A contrario, les bas salaires d’un pays se retrouvent en concurrence avec les bas salaires des autres pays, ce qui descend le décile bas encore plus bas d’une manière générale.
Pour les autres déciles, je veux bien croire ce qu’indique l’indice de Gini.
Ca tient intuitivement la route. Mais je vous recommande vivement de regarder la présentation Gapcast #4 de Hans Rosling, intégrée à mon article https://drgoulu.com/2009/03/21/combien-dinegalite/ . Un problème réel est que le revenu y est représenté sur une échelle logarithmique qui ne rend pas facile de voir ce qui se passe pour les hauts revenus.
Mais n’oubliez pas que la population mondiale a presque doublé depuis 1970. Il est « normal » qu’il y ait 2x plus de riches puisqu’on est 2x plus, par contre le fait qu’il y ait à peu près le même nombre de pauvres est un progrès d’un facteur 2 !
En passant, le SMIC français actuel correspond à à peu près $5 par jour (je n’ai pas calculé en $ constants…)
Je persiste à penser que le talent d’un patron/ manager est très difficilement mesurable. Le cours d’une action est pour moi un mauvais critère : il est possible de faire monter artificiellement l’action d’une boite en la vendant par morceau : est-ce une preuve de talent ? De plus les actionnaires ne sont pas les seuls partis prenant dans une entreprise : il y a les banques, les employés, les clients… Un patron qui fait augmenter le cours de l’action mais fait baisser le chiffre d’affaire, il a du talent ?
Ma conviction est qu’il n’y a pas moyen de savoir facilement si un patron fait du bon boulot, sauf 20 ans après son passage. Les patrons ont au moins comme talent de faire penser qu’ils sont les meilleurs et d’éliminer leurs concurrents. Mais une fois aux commandes, je ne vois pas comment on peut dire s’ils sont bons.
Parce qu’il suffit d’aller aux AG pour voir lesquels sont bons et lesquels ne le sont pas ? Fichtre, un coup à démoraliser tous les chasseurs de tête !
« On ne paie pas les top managers pour leur travail mais pour leur talent,
et pour qu’ils jouent dans nos équipes plutôt que dans celles d’en
face. »
Je dirais plutôt, « On ne paie pas les top managers pour leur travail mais pour leur talent supposé rare et inestimable, et pour qu’ils jouent dans nos équipes plutôt que dans celles d’en
face. »
Pourquoi supposé ? Par ce que c’est une histoire d’offre et de demande. Combien de personnes dans le monde sont considérées comme capables de dirgier une multinationale ? Pas beaucoup. Et c’est dans ces grandes entreprises que les inégalités de salaires sont importantes.
Dans bien des PME, en France tout du moins, les chefs d’entreprise gagnent des salaires souvent plus faibles que les cadres des grandes entreprises (http://www.entreprises-et-cites.com/Default.aspx?tabid=359&IdModule=2331&IdElementInModule=10465).
Cela s’appelle l’effet star.
http://econoclaste.org.free.fr/dotclear/index.php/?2012/12/29/2066-baby-i-m-a-super-star
« Et c’est dans ces grandes entreprises que les inégalités de salaires sont importantes. » Justement, ce n’est pas sur du tout !
Le rapport des extrêmes max/min sera effectivement plus grand, tout comme il sera plus grand dans une grande ville que dans un village car cette mesure n’est pas « indépendante de la population », ce qui est une des 4 propriétés requises d’une bonne mesure des inégalités ( https://en.wikipedia.org/wiki/Income_inequality_metrics ) C’est ce qui fait qu’il existe un moyen tout simple de contourner l’initiative 1:12 en séparant les entreprises en 2, une pour la direction et une pour la production par exemple. Ca se fait déjà souvent pour d’autres raisons d’ailleurs.
Si on mesure les inégalités par une bonne mesure comme le coefficient de Gini, il n’est pas du tout sur que Novartis verse des rémunérations plus inégales que votre garagiste.
« C’est ce qui fait qu’il existe un moyen tout simple de contourner
l’initiative 1:12 en séparant les entreprises en 2, une pour la
direction et une pour la production par exemple. »
C’est déjà ce que font les multinationales pour l’optimisation fiscale. Je ne doute pas qu’une loi tentant d’empêcher des rapports 1:12 de salaires échouerait dans l’organisation actuelle de l’économie mondiale. Mais dans les faits, si on prend une multinationale qui aurait encore ces usines en propres et que l’on consolide les masses salariales entre la direction générale, les centres de R&D put être encore situés dans des pays « occidentaux » et les usines en Asie ou autres pays à bas coûts, je serai curieux de connaître le coefficient de Gini.
Et il y a encore plus radical que de scinder les activités en deux sociétés distinctes ayant encore des relations capitalistiques ensemble. Les grands groupes sous-traite à grandes échelle. Le modèle fabless a des avantages 🙂
« des sommes telles qu’en une vie entière les autres ne pourront jamais amasser ». Mais pourquoi donc voulez vous amasser du fric ? Personne ne fait ça, à part Oncle Picsou! Le fric ça ne sert à rien dans un coffre, ça ne sert qu’à acheter des trucs, donc à payer des gens qui font des trucs, donc vous j’imagine.
En Suisse, l’industrie horlogère exporte pour ~20 milliards de francs de montres par année, soit pratiquement 3000 Frs par habitant, 3000 Frs qui passent tôt ou tard par votre poche, chaque année. Pour ça, il faut que des millions de gens chaque année soient prêts à payer des milliers de francs pour une nouvelle montre au lieu de regarder l’heure sur leur téléphone portable. Donc il faut:
1- qu’il y ait des riches, sinon on ne vendrait que des Swatch faites sur des lignes de montage automatique, avec très peu de personnel
2- que nous ayons des génies du marketing comme Nikolas Hayek ( https://drgoulu.com/2007/05/15/montre-mecanique-contre-quartz/ ) qui aient une vision à long terme d’une stratégie et arrivent à la mettre en place, souvent contre vents, marées, et oppositions farouches. Il n’y a juste aucune chance qu’ils y arrivent par hasard. Et s’ils échouent, on les descend en flammes en les accusant d’avoir ruiné une boite et mis des milliers de gens au chômage. N. Hayek est devenu milliardaire, est-ce injuste ?
« Mais pourquoi donc voulez vous amasser du fric ? Personne ne fait ça, à part Oncle Picsou! Le fric ça ne sert à rien dans un coffre, ça ne sert qu’à acheter des trucs, donc à payer des gens qui font des trucs, donc vous j’imagine. »
Hum … L’argent investi par les riches étrangers à Paris (j’y réside) est principalement dédié … à l’immobilier. Dans l’ancien, dans les arrondissements qui les font rêver. A part quelques agents immobiliers spécialisés, ça ne fait pas bosser grand monde !
Et ils font quoi avec l’argent, les agents immobiliers ? Ils ne paient pas une secrétaire, de la publicité, des loyers ? ils ne s’achètent pas des Renault, des vacances à la Baule et des petits LU au Carrefour ? Tout les gens qui produisent tout ça bossent (un peu) grâce aux riches étrangers qui achètent des apparts à Paris et ailleurs.
Tous les étrangers qui achètent des produits et services français sont tout simplement votre seul espoir de sortir de votre vrai problème, qui est le double déficit de l’Etat et de la balance commerciale https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9ficits_jumeaux
C’est intéressant, mais je rejoins le commentaire de Quentin: autant il est facile de faire le lien entre talent et performance (classement ATP) pour un tennisman, autant l’exercice devient polémique pour un entrepreneur. Les scandales concernent à mon sens les primes et salaires de patrons qui ont notablement sous-performé (Elop, le patron de Nokia en est le dernier exemple flagrant mais il y en a beaucoup beaucoup d’autres)…
Absolument. Mais ce n’est pas le débat de l’initiative 1:12 car nous (les Suisses) avons déjà voté et accepté en début d’année l’initiative Minder sur ce sujet 😉
Sans compter qu’il y a là un biais de réussite. Il est toujours plus facile quand on a réussit de dire qu’on le doit à son talent ou à son travail qu’à la chance, mais dans les faits je suis assez dubitatif. A mon avis l’immense majorité des gens qui réussissent se sont simplement trouvé au bon endroit au bon moment (quand ils ne sont pas tout simplement bien nés) et partagent leur talent avec des milliers qui ne réussissent pas.
La chance joue certainement un rôle, mais on appelle souvent « chance » ou « hasard » le résultat de systèmes tellement complexes qu’on ne les maîtrise pas. Quand Federer frappe une balle entre ses jambes à l’aveugle en courant vers le fond du court de Wimbledon et marque le point, c’est de la chance ou du talent ? « Il n’y a que le résultat qui compte » m’a dit un autre de mes patrons…
Un aspect qui m’intéresse beaucoup dans ce débat est celui du temps. les décisions du top management ont de l’effet pendant des années, voire des décennies mais leur bonus est souvent versé à la fin de l’année en cours. La « chance » d’un manager en exercice dépend beaucoup des décisions prises par son prédécesseur. A mon avis s’il y avait quelque chose à faire dans le domaine de la rétribution des top managers, ce serait de décaler leurs primes et bonus dans le temps de , disons, log10(nombre d’employés) années. 10’000 employés : 4 ans. 100’000 employés : 5 ans. Mais ça ne serait pas juste pour le dernier sauveteur potentiel avant la faillite…
Le double effet taille/temps est en effet fondamental : dans une PME, les décisions du PDG ont des conséquences quasi-immédiates, et potentiellement radicales, sur le futur de l’entreprise.
C’est infiniment moins vrai dans une TGE (Très Grosse Entreprise) … où les salaires sont pourtant nettement plus élevés.
dans une TGE, il y a des directeurs de départements qui ont des salaires comparables à ceux des PDG de PME d’effectifs comparables à leur département…
Ce qu’il y a en plus dans une TGE, ce sont justement des gens qui doivent (statistiquement) avoir un talent d’anticipation encore plus développé.
Idée : mettre Elizabeth Teissier à la tête de Renault ! Mais selon une rumeur ( http://fr.mediamass.net/people/elizabeth-teissier/plus-gros-salaire.html ) elle gagne 46 millions d’Euros toute seule, donc elle ne voudra pas 🙁
– peut-être que l’initiative 1:12 n’est pas strictement équivalente à une diminution des inégalités suivant le coefficient de Gini (qui rappelons le au passage est légèrement biaisé en faveur des populations moindres) mais en pratique c’est certainement une bonne manière de s’en approcher. Les salaires étant généralement fixés les uns par rapports aux autres, on peut s’attendre à des effets mécaniques.
– on peut critiquer le salaire des sportifs et acteurs de cinéma comme on critique celui des patrons. Il me semble qu’il y avait eu des polémiques à ce sujet (en France en tout cas)
– personne ne nie que certains patrons produisent de la valeur. Mais leur rémunération est elle réellement la traduction économique de cette valeur ou le résultat d’effets de concentration ? Si un acteur de cinéma gagne énormément plus qu’un acteur de théâtre, le doit il à son talent ou aux inventeurs du cinéma et des technologies de l’information qui lui permettent de jouer devant des millions de personnes ? Si un patron de multinationale gagne autant le doit il à son talent ou au système capitaliste qui lui permet d’agréger le produit du travail de millions de salariés ?
pourquoi le coefficient de Gini serait-il « légèrement biaisé en faveur des populations moindres » ?
Il y a certainement un effet de levier du au nombre de spectateurs ou collaborateurs. Mais pour son premier film, l’acteur ne sera pas beaucoup plus rétribué qu’au théâtre. C’est quand les gens vont venir voir les films parce qu’il joue dedans qu’il va toucher le pactole : son talent, comme celui d’un sportif n’est plus de jouer mais d’amener des clients à une entreprise.
Aucun footballeur inconnu n’est engagé au Manchester United, aucun balayeur n’est engagé comme patron d’une multinationale : il faut monter les échelons en passant d’une petit club/entreprise à une structure plus grande et ambitieuse, se faire remarquer, marquer des buts, et amener des clients.
Regardez par exemple Carlos_Ghosn : parlant 7 langues et après X et Mines, il devient responsable du département de recherche sur les pneus destinés aux véhicules agricoles chez Michelin…
Ce n’est que 20 ans et plusieurs postes plus tard qu’il ressuscite Nissan dont il a perçu 9 millions en 2012 ( je rêve d’une 370Z) et 2 millions de Renault où il ne s’en sort pas si bien (après 3 Scénic, je n’achèterai plus de Renault) : ça me semble cohérent 😉
Ne pas oublier : le salaire des grands patrons et celui des milliers de salariés (n’exagérons pas, il n’y a pas d’entreprises privées de 1 million de salariés) viennent d’une seule poche : celle des clients.
Si ma mémoire est bonne il y a un biais de taille par effet combinatoire (ex. un pays ayant une région riche et une région pauvre, chacune égalitaire, sera pourtant inégalitaire. Plus un pays est grand plus cet effet peut jouer)
Il me semble y avoir un peu de naiveté dans ta façon de voir les choses, et j’aimerai les voir appuyées par de la sociologie plutôt que par quelques anecdotes type « success story » . A mon avis derrière ces jolies histoires les réseaux jouent à plein (X et les mines quand même…), ainsi que ce que tu appelles « effet de levier ».
Effectivement dans une économie de marché mondialisée , par effet systémique, ce sont les premiers qui remportent tout le pactole.. La question importante c’est : est-ce juste ? Est ce que ça correspond à leur contribution réelle ?
On peut répondre à la néolibérale : c’est le marché libre donc c’est juste. Réponse simpliste qui néglige complètement ce que les économistes appellent les externalités (à quel point c’est la société dans son ensemble et non pas tel ou tel patron qui crée le succès d’une entreprise). Aujourd’hui plus grand monde ne croit sérieusement à cette histoire… Et si la question de la justesse des salaires est certainement complexe, franchement affirmer qu’un salaire douze fois supérieur à celui d’un travail pénible est juste, ça me parait difficile à défendre.
Si tu retrouves une référence sur ce biais de Gini, ça m’intéresse. Je connais les http://fr.wikipedia.org/wiki/Indice_de_Hoover et http://fr.wikipedia.org/wiki/Indice_de_Theil et selon http://en.wikipedia.org/wiki/Income_inequality_metrics les trois ont la propriété d’indépendance de la population, mais effectivement la combinaison de distributions a des effets qui peuvent paraître paradoxaux. J’en cause un peu dans https://drgoulu.com/2009/03/21/combien-dinegalite/ notamment à propos de la géniale vidéo de Rosling.
J’admets que mes « success story » n’ont pas valeur d’étude sociologique. Mais j’affirme que le marché est réel : ces top managers ne sont pas uniques, et ne sont pas non plus seuls être candidats à un poste. Le conseil d’administration de Renault a du en choisir un parmi des centaines de gens de X, des Mines et de plein d’anciens managers de plein de boites. C’est tombé sur Ghosn, donc il a au moins du leur paraître 1% meilleur que les autres, et surtout capable de faire exécuter ses décisions aux autres.
La question ne se pose même pas de savoir si c’est « juste » ou correspond à une contribution réelle. On ne paie pas Ghosn et les autres pour ça mais pour maximiser les chances que l’entreprise gagne. Qui prendrait le risque d’engager quelqu’un de moins bien profilé pour économiser quelques millions, surtout lorsqu’il s’agit de sauver une grosse entreprise avec des dizaines de milliers d’emploi à la clé ?
Si les salaires dépendaient juste un tout petit peu de la pénibilité du travail, nous serions tous des mineurs de soufre indonésiens multi millionnaires… Les salaires sont injustes, mais bizarrement à la fin les inégalités de revenu en Suisse sont plus faibles que dans les pays qui régulent les salaires…
Plutôt que « c’est le marché libre donc c’est juste », je dirais plutôt « le marché libre est le pire système à l’exception de tous les autres. » 😉
Effectivement la question de la justice ne se pose pas si on part du principe que le système actuel est le meilleur qui soit… (ceci dit nous vivons dans un système de marché régulé fort heureusement et les pays qui redistribuent ne sont pas ceux qui sen sortent le moins bien )
Sur la faiblesse des inégalités en suisse et le lien avec la régulation des salaires : je m’abstiendrait de généraliser à l’emporte pièce… ( Je suis sûr que Monaco est très égalitaire aussi… pas sûr que l’existence de Monaco tire les inégalités vers le bas pour autant !) Pareil, une petite étude économique serait la bienvenue sur le sujet !
Si, Monaco tire les inégalités de la France vers le bas ! La Suisse, la Belgique, l’Espagne et surtout l’Angleterre aussi d’ailleurs ces temps ci. On pourrait effectivement faire une étude économique pour voir si le fait que les inégalités en France n’augmentent pas n’est pas en partie imputable aux exils fiscaux …
Enfin ça c’est au premier coup d’oeil. Parce qu’au second, si les expatriés fiscaux désinvestissent en même temps en France et que ça provoque ne serait-ce qu’un tout petit peu de chômage supplémentaire, les inégalités vont y augmenter …
La redistribution c’est très bien, mais personnellement ça a été ma grande surprise en étudiant ce sujet de voir qu’en Suisse elle est très faible (comme aux USA) mais que nos revenus sont à la base très égalitaires. Je ne me l’explique pas totalement, culture, formation + beaucoup de petites entreprises j’imagine, mais c’est sans aucun doute un atout à préserver en ne régulant pas pour des raisons idéologiques un système qui marche très bien.
Je parle globalement c’est bien ça qui compte non ? Monaco tire les inégalités vers le haut parce que c’est un lieu d’évasion fiscal (donc qui sert à enrichir les riches).
Pour la Suisse j’ai tendance à penser qu’il s’agit d’une certaine uniformité sociale pas forcément liée à la politique économique du pays mais je me trompe peut être.
L’argent que les monégasques et autres exilés fiscaux ne paient pas au fisc, ils en font quoi ? Ils achètent des yachts, des ferrari, des montres suisses etc. Et des actions dans des entreprises qui fonctionnent. Bref, il est redistribué+réinvesti à la partie active de l’économie plutôt qu’à des fonctionnaires.
Je ne cautionne pas, surtout parce ce que moi aussi j’aimerais bien un yacht et une ferrari et que donc c’est trop injuste, mais je ne suis pas convaincu qu’on puisse démontrer que l’exil fiscal tire les inégalités globales vers le haut…
Si les pauvres paient les impôts mais pas les riches, ça n’augmente pas les inégalitées ? Les riches s’exilent sans doute par pure altruisme envers les ouvriers qui fabriquent des yachts, pas par appat du gain… Non mais quelle fable… A un moment donné un peu de bon sens ne fait pas de mal plutôt qu’une adhésion aveugle à une doctrine théorisée par Hayek mais largement critiquée depuis. Plus aucun économiste ne pense sérieusement que les principes libéraux que vous avancez sont le fin mot de l’histoire (une part tout au plus) même s’ils sont allègrement repris par certains, notamment les syndicats patronaux, pour justifier leurs intérêts à ne participer à aucun effort collectif. Le problème est que les principes libéraux que vous énoncés tiennent de la doctrine plus que de l’observation d’une réalité empirique. C’est très beau sur le papier mais le monde n’a jamais fonctionné comme ça malheureusement..
Je vous recommande de lire la référence [1] OCDE 2012, « Inégalités de revenus et croissance : le rôle des impôts et des
transferts », OCDE Département des Affaires Économiques, Note de politique économique, no 9, janvier 2012. Vous y trouverez plein de choses intéressantes qui relativisent l’effet redistributif des impôts sur le revenu.
Parce qu’il existe plein d’autres impôts, par exemple sur la consommation (TVA), sur le bénéfice des sociétés etc. et qu’il faut voir l’effet macro, sur le long terme et sur l’ensemble de la population. Et les faits expérimentaux sont que les inégalités n’augmentent pas plus en France qu’en Suisse sur une longue durée malgré des politiques fiscales très différentes.
Comme c’est très compliqué et qu’on a pas la place ici, j’illustre mon propos par des exemples choisis et calculés à l’emporte-pièce plutôt qu’avec des généralités du genre « plus aucun économiste ne croit à ça » sans aucune référence. Ca se vaut bien, non ?
Donc je prends un entrepreneur français idéalisé dont l’entreprise en France fait 1 M€ de bénefice, taxé à 33% ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Imp%C3%B4t_sur_les_soci%C3%A9t%C3%A9s_en_France#Taux_d.27imposition). Il lui reste 666’666 € de revenu, taxé à 49% ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Imp%C3%B4t_sur_le_revenu_(France ). Il en a marre, déménage à Monaco pour ne pas payer cet impôt sur son revenu, et décide de réinvestir presque tout son impôt « évadé » soit 300’000€ dans son entreprise en France en créant 3 bons jobs qui lui coûteront 100’000€ chacun. Il verse donc 44% des 300K€ soit 132K€ comme ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Prélèvements_obligatoires) et trois salaires de 56K€ qui seront taxés à hauteur de 30%, soit 50 K€ de plus par l’Etat français, plus de 20% de TVA sur quasi tout ce qui reste aux 3 salariés : 20K€ de plus
Son investissement lui rapporte 10%, donc 30’000€ de bénef supplémentaire taxé à 33% : 10000€ d’impôt sur le bénéfice supplémentaire.
Perte sèche pour l’Etat français après un an d’exil fiscal : 333 -132-50-20-10 = 121 K€. Après 2 ans si l’entrepreneur crée encore 3 emplois de plus : aucune
Gain pour l’infâme exploiteur du prolétariat : 33+20 = 53 K€
Différence : 3 emplois créés.
Augmentation des inégalités ? pas sur du tout…
En passant, je ne comprends pas la notion d’ « appât du gain ».
A quoi bon avoir de l’argent si ce n’est pas pour acheter des trucs avec ? Et quelle différence entre acheter un yacht et un steak ? Dans les deux cas on paie le travail des gens qui l’ont produit. Et avec les impôts, on paie (collectivement) les services d’un Etat. Rien à voir avec de l’altruisme dans aucun des cas.
(me rappelle qui faut que je lise http://www.swissinfo.ch/fre/societe/Un_livre_pour_se_reconcilier_avec_son_percepteur.html?cid=31568000 )
C’est une belle histoire mais elle suppose :
– que l’entrepreneur va réellement créer de la croissance plutôt que de prendre les parts de marché de ses concurrents, ce qui est possible si l’économie est effectivement en croissance (l’est-elle vraiment en Europe ?)
– qu’il va utiliser ses bénéfices pour créer des emplois plutôt que pour rémunérer ses actionnaires et alimenter la spéculation, qu’il suffit qu’une entreprise gagne de l’argent pour créer des emplois. Une entreprise crée des emplois si elle en a besoin, si ça peut lui rapporter d’augmenter son activité, mais ne convertit pas systématiquement son bénéfice en emplois (qui, du point de vue d’un actionnaire, constitue une « charge »). Il existe des entreprises qui font du bénéfice, mais qui licencient. Si vous trouvez ça cynique, le peu de gens que je connais qui ont participé à des négociations actionnariales de grandes entreprises vous confirmeront que ces discussions atteignent plus que largement ce degrés de cynisme envers les travailleurs de l’entreprise.
– cela suppose enfin que l’argent non perçu par l’état français n’aurait pas permis, lui, de créer des emplois. A vous croire, l’impôt est un gouffre dans lequel l’argent disparaît pour ne plus jamais ressortir… (A bien y réfléchir où est le gouffre ? Je pense qu’on peut dire ça de la finance internationale, des bulles financières notamment, à plus d’un titre !)
Maintenant plaçons les choses en contexte. Les entreprises qui peuvent se permettre de pratiquer l’évasion fiscale, ce ne sont pas les PME de régions, ce sont des multinationales sur lesquelles la pression actionnariale est énorme. Ces entreprises n’ont pas besoin de quelques millions de plus ou de moins pour créer des emplois : elles pourraient déjà se permettre d’en créer bien plus, ce même si elles payaient correctement tous leurs impôts. L’évasion fiscale n’est donc certainement pas un facteur de création d’emploi chez nous ! C’est ce qui permet d’alimenter les marchés de spéculation financière relativement déconnectés du reste de l’économie : de faire de l’argent avec de l’argent plutôt qu’en travaillant…
C’est un fait (non pas la conséquence hypothétique d’une jolie théorie économique) que les plus grandes fortunes se sont énormément enrichit ces dernières années, en pleine crise économique… Vous m’expliquerez sans doute que c’est à cause de l’impôt ?
Je pense que vous accepterez d’admettre que l’évasion fiscale constitue un manque à gagner énorme pour les états. A quoi aurait servi ce manque à gagner ?
– aux aides sociales, qui auraient pu créer de la croissance. Donner 10€ à quelqu’un dans le besoin, il le dépensera. Donner 1000€ à un riche, il l’épargnera (ou spéculera avec)… Difficile de nier que les aides sociales diminuent les inégalités, et de façon directe et pratique plutôt qu’indirecte et théorique.
– à l’éducation publique et gratuite, et aux biens communs en général. Il s’agit d’éléments difficilement quantifiables, mais dont il est certain qu’ils diminuent les inégalités (imaginez qu’il faille être riche pour recevoir une éducation digne de ce nom).
L’entreprise de votre exemple profite donc de l’éducation dont dispose la main d’oeuvre qu’elle embauche en France, mais sans pour autant financer cette éducation puisqu’elle ne paie pas ses impôts en France (un peu comme si je mangeais dans vos assiettes sans faire la vaisselle. C’est ce que je voulais dire par « appat du gain », rien de plus). Cette entreprise peut se permettre d’aller à Monaco parce qu’elle en a les moyens (sinon tout le monde le ferait) -> ce sont les plus aisés qui paient le moins pour ce dont tout le monde profite -> augmentation des inégalités (avantage aux plus aisés). Je ne vois pas bien comment échapper à ce raisonnement…
Désolé si mes formules » tous les économistes » semblent un peu légère. Un élément important est ce qu’on appelle la « tragédie des communs » : un marché libre est incapable de gérer les biens communs en général, qui seront systématiquement détériorés (parce qu’en prendre soin profite aux concurrents également). Je pense que l’idée communément admise est que l’impôt fonctionne sur le mode du « dilemme du prisonnier » : il profite à tous si tout le monde coopère. Mais l’idée que le marché libre serait auto-suffisant et systématiquement plus efficace qu’un marché régulé par de la redistribution, y compris pour résorber les inégalités, me semble vraiment indéfendable, anti-empirique, et extrême.
inutile de dire que je ne suis pas d’accord, mais je vous propose d’en rester là parce qu’on avance pas.
Je vous re-suggère de lire la référence [1] où il y a un passage sur la difficulté de redistribuer les revenus par la fiscalité sans altérer la croissance, et http://www.rue89.com/2013/06/25/tete-exiles-fiscaux-avocate-raconte-243627 pour (essayer de) vous ouvrir les yeux sur ce qui se passe quand on y arrive pas.
Si vous voulez poursuivre le débat, je suis intéressé par votre réponse à la seule question que j’ai posé dans l’article « Pourquoi donc sommes-nous choqués par le fait que quelques patrons d’entreprises employant des dizaines de milliers de personnes gagnent autant qu’un génie de la raquette ou du football ? »
Pourquoi donc personne dans cette discussion n’a-t-il rebondi sur les revenus et des inégalités des 100 meilleurs joueurs de tennis (où j’ai été 100% factuel) ? Tout le monde trouve que c’est normal ?
Le rapport de l’OCDE est très clair sur le fait que les impôts diminuent les inégalités !
Et encore ils ne parlent que des transferts monétaires , pas d’éducation etc.
J’ai répondu dans mon premier message sur les footballer : ça ne me choque pas moins surtout quand on sait que les petits clubs de foot galèrent à se financer (mais toutes les stars y sont passées un jour ou l’autre ! encore la tragédie des communs et l’effet « le premier raffle tout »). Sinon parler de créateur de richesse à propos des grands patrons du CAC40 est un bien grand mot. Des grosses boites qui se prennent des parts de marché à coup de marketing : ce n’est pas à proprement parler de la création de richesse, et puis ce sont les salariés qui font tourner la boite et créent les richesses. Le rôle du patron est surévalué surtout pour les grosses boites déjà bien lancées. A mon avis il y a beaucoup d’effet spéculatif dans le salaire des patrons comme des sportifs de haut niveau. C’est un problème quand le véritable générateur de richesse est le tissu social, dans les deux cas.
Dr Goulu, suite et fin.
Il y a peu de temps, j’entendais à la radio, je ne sais plus qui, qui disait que nous voyions le monde avec une paire de lunettes. J’aime bien cette métaphore. Je pense que notre intérêt à tous, mais ça aussi peut-être discuté… est de nous assurer autant que nous puissions le faire, que nos lunettes ne soient pas des verres déformants. Vraiment, si vous ne voyez aucune différence entre acheter un yacht et un steak, comment pourriez voir celle entre acheter son steak dans une AMAP plutôt que dans une grande surface ? Je pense que vous avez envie autant que moi, de voir le plus clair possible. Vous serez alors d’accord pour admettre que nous devons nous méfier de certains phénomènes, tel que celui du déni de réalité. Je vous invite à lire deux textes (déni de réalité – lucidité) écrits par un certain T sur son blog http://plumaplumbum.over-blog.com/. Je vous invite aussi à essayer les lunettes d’autres penseurs, intellectuels, talents, génies… appelez-les comme vous voudrez, tels qu’Henri Laborit ou Albert Jacquard qui vient juste de nous quitter. Je sais, nos journées ne font que 24 heures et on ne peut être au four et au moulin. On ne peut passer son
temps à comparer les performances de la Nissan Chépaquoi avec celle de la Renault Mégane et en même temps lire et méditer « la nouvelle grille » ou « j’accuse l’économie triomphante. » J’ai cité ces deux (des scientifiques) qui me viennent spontanément à l’esprit, mais il y en a évidemment beaucoup d’autres.
pour le coeff de gini : chercher « small sample bias » sur la page en anglais http://en.m.wikipedia.org/wiki/Gini_coefficient
Ah oui, très intéressant merci!
Effectivement il semblerait que l’article http://www.mitpressjournals.org/doi/abs/10.1162/rest.2003.85.1.226 ait levé le lièvre, mais il y a eu des propositions de correction comme http://arno.uvt.nl/show.cgi?fid=97249 et apparemment l’OCDE effectue une correction dans ce sens: dans
http://www.oecd.org/std/15918996.pdf on lit dans l’encadré page 3 : « The Adjusted Territorial Gini Index corrects for this bias by dividing the Gini coefficient by its maximum value in each country. The index resulting from this correction has two properties (Deltas, G. (2003)): the bias is very small and its direction cannot be signed (i.e. disparities are not systematically underestimated). »
Ca pourrait expliquer pourquoi les valeurs du rapport OCDE sont légèrement différentes de celles publiées par les pays, notamment de l’Office Fédéral de la Statistique http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/20/03/blank/key/02/06.html 🙂
Je sens que je tiens mon prochain article sur le coefficient de Gini, merci encore !
« La question ne se pose même pas de savoir si c’est « juste » ou correspond à une contribution réelle. »
C’est quand même un peu ennuyeux … Le marché du joueur de tennis est certes inégalitaire, mais on a tous les jours (ou presque) des occasions de vérifier son bien-fondé, via les affrontements entre les uns et les autres (je suis en train de regarder Gasquet-Del Potro au moment où j’écris) …
La justification du salaire des PDG ne s’appuie que sur des suppositions : on ne peut pas faire d’expérience (concrète ou de pensée) valable pour quantifier la plus-value éventuelle d’un bonhomme par rapport à un autre.
Dr GOULU
Je suis bien loin de vous arriver à la cheville en matière de compétences scientifiques. Imaginons que nous puissions calculer que les vôtres soient mille fois supérieures aux miennes. Nous pourrions peut-être en conclure que votre talent est mille fois supérieur au mien, mais qu’en serait-il de notre valeur ? Votre vie vaut-elle mille fois la mienne ?
Les mathématiques sont certes un outil formidable pour expliquer le monde, mais voyez-vous, on ne peut pas tout mettre en équation. Que le coefficient de Gini soit l’outil le plus adapté pour mesurer les inégalités de revenus, soit. Toutefois, la valeur d’un homme quel qu’il soit, ne peut se ramener à un quelconque prix que l’on donnerait à sa vie, qu’elle soit découpée en années, en jours, ou en heures… Comment une heure de la vie d’un grand talent quelconque, pourrait-elle valoir cinquante, cent ou mille fois celle d’un simple balayeur ? Une heure reste une heure, non ? Alors, vouloir déjà limiter l’écart des revenus à douze, n’a rien d’extrémiste, à mes yeux.
Merci de votre commentaire Papimichel,
loin de moi l’idée d’attribuer une valeur à la vie, même si certains le font (les assureurs) et surtout de comparer la valeur des gens en fonction de leur travail. Je le dis clairement, pour moi une vie de grand patron a la même valeur qu’une vie de mineur de soufre dans un volcan indonésien (le pire job que je puisse imaginer).
Le problème est que les bidonvilles sont plein de gens ayant les compétences requises pour miner du soufre, mais que les gens capables de diriger des entreprises de dizaines de milliers d’employés sont très rares, et que c’est cette foutue loi de l’ offre et de la demande qui fixe les rémunérations.
Or cette loi n’est pas linéaire, pas proportionnelle : je n’ai pas besoin d’être 1000x meilleur en sciences que vous, il suffit que je sois 1% meilleur en sciences que vous pour obtenir un job de scientifique auquel nous postulerions les deux, et si vous êtes 1% meilleur que moi en management, c’est vous qui serez mon chef. Disons statistiquement, parce que les RH ne savent ni évaluer un niveau en sciences, ni en management 😉
C’est une non-linéarité de ce type qui intervient dans le tennis ( voir https://drgoulu.com/2008/05/12/le-comptage-des-points-au-tennis/ ), mon exemple n’est pas du au hasard…
Donc le grand talent, qu’il soit top manager ou footballeur, ne prend peut-être que 10% de décisions meilleures (passer ou tirer au but, investir à Sochaux ou pas…) qu’un balayeur. Ce petit écart multiplié par la taille de l’entreprise/club de foot fait (statistiquement) la différence entre Mundial et relégation pour des dizaines de milliers d’employés, dont vous, moi, et les 118998 employés de Novartis qui ont des salaires entre celui du grand patron et celui du balayeur. C’est à eux qu’il faudrait demander s’ils acceptent de payer ~1 Frs / jour chacun pour avoir un patron meilleur que celui de leurs concurrents …
Une anecdote qui m’est revenue à propos de « une heure reste une heure, non ? » Avec une de mes filles, nous sommes allés voir une conférence de Claude Nicollier », excellent communicateur qui nous a raconté sa carrière et ses vols dans l’espace, c’était passionnant. En rentrant ma fille me dit : « mais finalement, ce monsieur, de toute sa vie il n’y travaillé que les 42 jours où il était dans l’espace … » 😉
Une chose tout de même concernant la différence entre un riche footballeur et un riche patron et en employant un vocabulaire marxiste qui manque aux commentaires polémiques plus haut avec Quentin Ruyant et Papimichel : je ne suis pas personnellement choqué qu’un footballeur (ou un acteur) gagne une fortune car il reste un prolétaire ; même si c’est une fortune, il gagne moins d’argent que ce qu’il n’en a produit (en pubs vendues pour le sportif). Le patron, lui, est un bourgeois : il gagne plus d’argent que ce qu’il n’a produit, la différence étant extorquée sur les salaires des employés.
Vous comprenez donc que je préfère le calcul du taux d’exploitation à celui de l’indice de Gini. Peut-être parce qu’il est encore plus juste ou méritoire que le deuxième. Mais bon, c’est de l’idéologie, de la psychologie ; de la morale, de l’éthique. Il est sûrement plus intéressant de raisonner en terme d’efficacité. Notre système, dont les hauts revenus des grands patrons est une conséquence, est-il efficace ? Oui, non… Peut-être. Apparemment pas avec ce simplissime constat mathématique d’une croissance infinie sur une planète finie.
Si on considère que le footbaleur a « produit » en pub, ventes de t-shirts etc, pourquoi ne pas admettre que le manager a également « produit » en décidant quel sportif prendre sous contrat, quelle agence de pub dessinerait les t-shirts et quelle fabrique chinoise les fabriquerait ? Considérer que le manager ne produit que des papiers le cul sur sa chaise de bureau c’est comme considérer que le footballeur ne produit que des passes et des shoots… Dans les deux cas les revenus sont amplifiés par l’effet levier : leurs choix (ou talent) est amplifié par une masse de clients et de collaborateurs sans laquelle ils ne gagneraient effectivement que des clopinettes. Et dans les deux cas, il suffit d’être juste un tout petit peu meilleur que l’adversaire pour faire une énorme différence.
Je pense que personne ne nie le talent de ces « grands patrons » et « entrepreneurs », malgré le corporatisme certain de ces milieux qui laisse chacun se demander si leur cooptation mutuelle n’entraîne pas un certain niveau de consanguinité, et donc une perte de talent. Et tout le monde serait d’accord pour leur laisser quelques avantages financiers ou autres, tant que les inégalités ne sont pas trop flagrantes dans l’ensemble de la population. Qu’un Suisse soutiennent les avantages des entrepreneurs me semble très logique, que des interrogations à ce sujet soient soulevées dans des pays moins égalitaires me semble tout aussi logique.